Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

L'infirmière a changé...

Publié le par Sophie Assimans

L'infirmière a changé...

En 25 ans, Les études d'infirmières ont changé. Le programme est désormais "universitaire". Les professionnels intellectualisent le métier. Les années d'études doivent être reconnues.

On est envahi de formations, articles, débats sur la prise en charge de la douleur, la préservation de l'autonomie...

On étudie tout sur le patient, on a de grands projets pour nos malades...

On se "gargarise" de nos diplômes, de nos spécialisations...

L'infirmier agit sur prescription médicale, c'est un exécutant. C'était, pour moi, une vocation, un métier de "passion". On apprenait les actes techniques, le fonctionnement du corps humain, les pathologies; on étudiait les besoins fondamentaux, la psychologie. Les stages nous confrontaient à la réalité de la complexité de l'être humain face à la souffrance. Aujourd'hui tout cela perdure, c'est la base de notre métier. Mais ce sont bien les valeurs humaines, la motivation, la remise en question, le sérieux de l'individu qui faisaient un praticien de qualité.

Aujourd'hui, la société a changé. L'individualisme n'a pas épargné les professions de santé. Ce qui se faisait de façon naturelle doit être appris, intellectualisé. Les relations humaine, l'empathie, le respect de l'autre ... ne sont plus des évidences. Les études sont allongées. Le programme est dense. Il faut justifier le cursus universitaire, le diplôme. Les 35h sont respectées, les week-ends préservés.

L'infirmier n'est plus curieux, il faut lui imposer une formation continue, dont il choisira le thème à son grès (selon le coût, la proximité, la durée ou éventuellement le sujet).

Mais qu'en est-il sur le terrain ?

L'infirmier, comme les autres professions, veut que son métier soit reconnu. Il veut qu'on l'aime, qu'on le plaigne.

Il veut qu'on reconnaisse la pénibilité de ses tâches, les responsabilités qu'il engage. Il veut qu'on le paye car il ne fait pas de "l'humanitaire". Il exerce son métier comme un autre. Il ne veut pas faire des soins au rabais, c'est bien ce qu'on lui a enseigné ! Mais quand on donne sa vie à la santé d'autrui, ce n'est pas politiquement correct de parler d'argent. L'infirmier est désorganisé pour défendre ses intérêts. Le service à autrui ne comble pas sa vie. L'infirmier est frustré !

Sa corporation est divisée. Elle vit en autarcie dans la cacophonie des frustrations individuelles des praticiens dirigeants. Les infirmiers sont nombreux, donc ils coûtent cher. Tant qu'ils seront désunis, leur pouvoir sera amoindri, leur avancée bloquée. Chacun le sait car l'action d'aujourd'hui n'honore pas le collectif de la profession.

On a appris à analyser les comportement des patients mais on est incapable d'appliquer cette analyse sur nous-mêmes... Quelle crédibilité peut-on avoir ?

Ainsi, chacun poursuit ses objectifs dans son coin amenant tant de disparité dans les soins. Personne ne voit plus le travail dans sa globalité. Les hospitaliers ne sont pas en accords avec les libéraux. Ils n'ont pas les mêmes intérêts !

Ainsi peu à peu, notre métier change...

On ne soigne pas un patient, on traite un symptôme

On ne calme pas la douleur, on crée un centre de la douleur...

C'est pour cela que j'ai choisi le libéral il y a 10 ans. Je voulais m'occuper des patients dans leur globalité.

DECRET DE COMPETENCE - 2004-802 du 29 juillet 2004 - Article R. 4311-2

Les soins : préventifs, curatifs ou palliatifs, intègrent qualité technique et qualité des relations avec le malade.

Respect des droits de la Personne, dans le souci de son éducation à la santé et en tenant compte de la personnalité (composantes physiologique, psychologique, économique, sociale et culturelle).

Protéger, Maintenir, Restaurer et Promouvoir la santé physique et mentale des personnes ou l'autonomie de leurs fonctions vitales, physiques et psychiques en vue de favoriser leur maintien, leur insertion ou leur réinsertion dans leur cadre de vie familial ou social .

Concourir à la mise en place de méthodes et au recueil des informations utiles aux autres professionnels, et notamment aux médecins pour poser leur diagnostic et évaluer l'effet de leurs prescriptions.

Participer à l'évaluation du degré de dépendance des personnes.

Contribuer à la mise en œuvre des traitements en participant à la surveillance clinique et à l'application des prescriptions médicales.

Participer à la prévention, à l'évaluation et au soulagement de la douleur, de la détresse physique et psychique des personnes, particulièrement en fin de vie au moyen des soins palliatifs, et d'accompagner, leur entourage.

Quand on entend certains représentants de la profession, "l'important, c'est que le patient soit content" !

L'infirmier n'est pas un "prestataire de service" que "paie" le patient ou la sécurité sociale.

Aujourd'hui le patient ne sait plus toujours faire la différence entre la "qualité du travail" et la "qualité du service".

Mais, l'infirmier, lui, fait-il toujours cette différence ?

Le patient ne notera pas la qualité du soin mais appréciera l'infirmier qui lui amènera le pain...

Le patient rechignera à vous présenter sa carte vitale mais appréciera de ne pas payer le soin...

Le patient ne s'étonnera pas de payer 10 € de déplacement au médecin et négociera à ne pas payer 2,50 € à l'infirmier.

Le patient ne s'étonnera pas de la visite du médecin plusieurs heures après son appel, mais s'agacera du retard de l'infirmier...

Le patient appréciera une balade en famille mais ne comprendra pas que l'infirmier n'ai pas récupéré son traitement à la pharmacie...

Le médecin exigera de l'infirmier une prise de sang en urgence mais ne s'inquiètera pas de recevoir le résultat 4 jours après.

La pharmacie ne s'inquiètera pas de devoir faire revenir l'infirmier de multiples fois quand l'approvisionnement des produits est mal assuré.

Tant de situations qui font le quotidien de l'infirmier libéral aujourd'hui !!!

Bien sûr, la société a changé. On constate que l'assistanat fait rage.

Alors, l'infirmier, pour être bien vu, doit se plier aux exigences des patients ou autres professionnels de santé.

S'il est juste professionnel mais pas serviable, "corvéable", il subira la sanction.

Le téléphone silencieux, la réputation altérée... Les revenus en baisse et les charges toujours aussi lourdes.

La profession pâtit aujourd'hui de "l'infirmier commercial".

Si chaque infirmier restait et s'inscrivait dans sa compétence telle qu'elle est décrite dans notre décret, il pourrait pourtant être épanoui et respecté.

Si l'on veut "jouer le jeu" de la société, il faut s'affranchir de la culpabilité.

Nous ne pouvons avoir la reconnaissance des autres si nous ne nous respectons pas nous-mêmes.

Je reste convaincue que c'est le plus beau métier mais je n'aime pas ce que l'on en fait...

Commenter cet article